Né en 1976, Japon. Vie et travaille à Bruxelles.

Bio

Aujourd’hui, tous les espaces semblent rationnellement organisés par l’homme. L’uniformisation des modes de consommation, des modes de déplacement, et, d’une certaine façon du temps, a produit des espaces urbains standardisés, universellement reconnaissables par leur fonction. Le passage d’une économie fragmentée et localisée à une économie mondiale, a également bouleversé profondément les repères qui permettaient de distinguer l’espace urbain de l’espace rural : si autrefois ces deux mondes semblaient juxtaposés, aujourd’hui, ils se trouvent imbriqués dans un faisceau de relations complexes (transactions marchandes, déplacements de populations, pratiques touristiques…) qui gomment les frontières spatiales et induit une réorganisation des territoires. Dans les sociétés fortement industrialisées, la nature domestiquée est appréhendable par de multiples systèmes de quadrillage (cadastres, plans de développement et d’aménagement, plans de déplacement…) qui sous – tendent des pratiques et des modes de vie semblables pour tous.

Dans le tissu urbain, l’hyper qualification des espaces et des relations spatio-temporelles génère des espaces sans qualité propre, qui « ne produisent aucun lien social, juste une fonctionnalité efficace » , des non-lieux tels que les définit l’anthropologue Marc Augé : « Si un lieu peut se définir comme identitaire, relationnel et historique, un espace qui ne peut se définir ni comme identitaire, ni comme historique définira un non-lieu (…). Dans un non-lieu, chacun est seul et semblable aux autres ». C’est un espace de transit, de passage (rond-points, passages, métros, autoroutes, voies rapides, échangeurs, gares, aéroport) où les pratiques , bien que communes (prendre le métro, payer avec une carte de crédit) renvoient à un statut d’anonymat et à une multitude d’actes isolés, déconnectés les uns des autres. Dans ces espaces définis, l’individu se trouve confronté à l’impossibilité d’établir une relation intime à l’autre ou une relation à l’espace qui ouvrirait sur une forme d’appropriation. Le non-lieu renvoie à la solitude absolue.

Il est enfin d’autres espaces urbains ou périurbains qui m’intéressent beaucoup, dans la mesure où ils semblent relever d’une autre logique. Ce sont les friches urbaines, des espaces à la marge, des terrains vagues, des espaces délaissés, pas exactement des non – lieux dans la mesure où ils relèvent d’un processus historique, traduisent un bouleversement, une transformation de l’espace pas totalement achevée. “Akichi” signifie en japonais terrain vide, terrain vague, terrain inoccupé. C’est un espace libre.

En m’attachant à photographier « L’envers du décor (2007) » je choisis de révéler le paysage marginal, les coulisses urbaines, plutôt que la scène principale… Pour moi, cet envers du décor, par des détails révélateurs, permet de découvrir la diversité des paysages. Dans le travail de la série « Lost World (2006) », le paysage recèle l’avant et le présent dans un même espace déconnecté de toute fonctionnalité, dans une temporalité insaisissable.

Lost World ( 2006-2007)

Ces parcs d’attraction se trouvent dans un état d’abandon depuis les années 90 ou 2000 à cause de changements économiques et du problème de la sécurité. Je suis attiré fortement par cet univers complètement décalé par rapport à la réalité comme si le temps s’écoulait à côté du nôtre.

 

L’envers du décor ( 2007 )

Les panneaux publicitaires jalonnent les routes, les voies de chemin de fer ; ils bornent les terrains vagues, les parkings…Le panneau en grand format montre non seulement l’image publicitaire mais il forme aussi une sorte de rideau qui sépare deux espaces. L’ espace à l’arrière du panneau est soustrait au regard externe. Entre l’image publicitaire qui est une image surexposée et celle de l’arrière qui révèle des matériaux bruts, du bois ou du métal, le contraste est stupéfiant. On y trouve des espaces très divers. Au delà du panneau, le paysage échappe aux catégories établies…

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